Physiquement Wes Andersen m’a toujours fait pensé à une sorte de version british et plus arty du chanteur Beck ! Pour ce qui est de leurs productions artistiques respectives, on peut également voir un parallèle, tant les œuvres de l’un et de l’autre sont gentiment barrées, mais finalement pleines de sens.
Au-delà des comparaisons bancales il est incontestable que le nouveau film d’Anderson, The Darjeeling Limited, poursuit sur la lancée des précédents et continue de construire l’univers plein de personnages, à la fois loufoques et abîmées par la vie, du réalisateur. Et après le « sea movie » The Life Aquatic, on est ici entraîné dans un « rail movie » aux allures prononcées de quête initiatique pour les trois personnages principaux du film, les frères Jack, Francis et Peter Whitman (joués respectivement par Jason Schwartzman, Owen Wilson et le dernier venu dans la bande à Anderson : Adrien Brody), qui se retrouvent donc embarqués dans une aventure ferroviaire (mais pas que) plutôt mouvementée à travers l’Inde, à la recherche d’une unité familiale perdue.
Il est une fois encore question d’abandon parental, de fuir sa famille…en bref de relations familiales à problèmes, thèmes récurrents dans la filmographie d’Anderson et qui semblent lui tenir particulièrement à cœur. Découlant de ces sujets délicats, d’autres sont évoqués de manière plus ou moins évidente, tels les addictions, l’inhabilité au dialogue, la négation de l’autre, l’appel à l’aide au travers du suicide (toujours raté d’ailleurs), et autres joyeusetés. Comment le réalisateur texan fait-il alors pour parvenir à faire sourire ses spectateurs ? Simple (pour lui)! En créant des personnages à la fois attachants et horripilants embringués dans des situations délirantes (trois frangins qui ne peuvent pas se sentir enfermés dans la cabine–couchette d’un train traversant l’Inde, déjà…) et en touchant à l’universel humain, ce qui ne peut pas manquer de fonctionner puisqu’au final les sentiments humains sont les mêmes partout. La patte Anderson suffit à faire le reste, à savoir un monde coloré mais qui reste relativement dur, des dialogues décalés entre des personnages paumés, un découpage très personnel de l’image où les mises en abîme scéniques ne sont pas rares, et bien entendu les fameux ralentis de début et de fin de film, caractéristiques du grand Wes.
En résumé, ceux qui ont aimé The Royal Tenenbaums et The Life Aquatic (entre autres) peuvent aller voir The Darjeeling Limited sans se poser de question, pour les autres, n’hésitez pas à prendre le train en marche.